La légèreté du fuseau

A l'opulence du grand siècle de Louis XIV, succède la légèreté du XVIII^ème. La reine Marie Lesczynska, Marie-Thérèse d'Autriche, Madame de Pompadour et ensuite Marie-Antoinette ont aprécié les dentelles plus légères: Chantilly, Malines, Bruxelles, tulle brodé...

Détail du tableau représentant Marie-Antoinette et ses enfants au Trianon en 1785 par Adolf Ulrik Wertmüller :

L'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche par Martin Van Meytens en 1759

On assista à une démocratisation de l'usage des dentelles. La bourgeoisie s'en empara aussi, d'autant plus aisément que des productions plus variées vinrent à elle : Chantilly, Valenciennes, dentelles de Flandres...

Une des provinces de France où le travail aux fuseaux s’établit le plus tôt est certainement l’Auvergne, beaucoup d’hommes y exerçaient la profession de colporteur. Ces montagnards parcouraient de longues distances pour ramener du midi et d’Italie des marchandises chères et peu encombrantes comme les soieries et les dentelles et venaient les vendre à Paris et dans le Nord; les femmes se mirent rapidement à reproduire ces dentelles et leurs maris les emportèrent pour les vendre.

La Révolution amena le rejet de tout ce qui pouvait contribuer au prestige de l'aristocratie et bien évidemment le luxe vestimentaire. Comme on le voit chez les muscadins et les merveilleuses, un peu d'excentricité permet aux jeunes gens de s'affirmer mais le dépouillement des tenues féminines révèle une aspiration à la liberté du corps. La mode est à l'imitation de l'antiquité grecque et romaine, la taille n'est plus marquée, une ceinture marque le buste juste sous les seins.

Napoléon 1^er réserva définitivement l'usage des dentelles aux femmes qui les portèrent en bordure de l'encolure ou pour souligner le bas de la robe. On vit le retour des chérusques dans le costume de cour (en collerette ou en épaulettes). La mode fut aux châles et aux étoles qui se mariaient avec légèreté aux mousselines et aux linons. Pour les messieurs, seul le port du jabot a subsisté, Napoléon ne porta qu'un peu de dentelle lors de son sacre.

Napoléon tenta bien de sauver les dentelles à la main, surtout le point d'Alençon et l'application de Bruxelles (qui était française) en favorisant leur port à la cour mais la concurrence des tulles anglais prit le dessus avec l'application d'Angleterre.

L'impératrice Joséphine en robe à chérusques,
tableau de Robert Lefebvre
Musée National des Chateaux de Malmaison et de Bois-Préau.

Robe de cour en point d'Alençon (1805) , donc réalisée à l'aiguille - Musées Royaux de Bruxelles.

C'est sous le règne de Napoléon III que la dentelle mécanique, tout comme les tissus, notamment ceux produits industriellement dans le nord de la France, vont connaître un essor considérable. Les grands châles en dentelle noire sont très appréciés de l'Impératrice Eugénie qui est l'égérie de la mode. La mise au point du métier Leavers dans le contexte économique du développement industriel permet au plus grand nombre d'accéder à des matières jusqu'alors réservées aux plus aisés, c'est ce que je vous propose de voir dans les chapitres suivants. 

L'Impératrice Eugénie entourée de ses dames d'honneur par Winterhalter en 1855.

Photographie d'Elisabeth (Sissi) lors du sacre et ci-contre reproduction de la robe exposée au chateau de Schönbrunn

Vers 1865, fut créé un nouveau style, dit Cluny, en soie noire. très utilisés pour la réalisation des grands châles noirs,  ces passements  se caractérisent par les rosaces de points d’esprit. Leur réalisation est d’une complexité particulière parce que le réseau n’est pas continu, s’y substitue une savante variété de jours et de motifs plus ou moins denses.

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